À la technologie prédominante, Rosita Warlock & Mr Djub opposent le plaisir simple et nu de la musique, le « ça passe ou ça casse », une spontanéité qui triomphe des tables de mixages et des sons trafiqués, et la chaleur d’un grain qui rendrait marteau n’importe quel producteur. En revenant sur la richesse d’un passé discographique early jazz & Rock’n Roll, swing, blues, music hall et populaire, répertoire fantastique classique ou Hollywoodien. (un univers sonore qui commence au début du XXème siècle et s’arrête à l’orée des années 50 avec l’arrivée du 33 Tours vinyle), ils évoquent un grand répertoire et le souvenir d’une industrie balbutiante où l’expérimentation était de mise, même en usine.
Sur trois gramophones (des bêtes de scène datant de 1912 et 1917) que l’on déplaçait à l’époque tels des ghettoblasters d’avant l’heure, 78 RPM Selector propose un voyage dans le temps, par et pour des musiques de référence. La production de l’époque met à disposition, en fonction des trouvailles de grenier, des centaines de milliers de titres qui ne demandent qu’à renaître sous des doigts experts, des versions standards aux versions rarissimes.
Le set construit une histoire entre l’esprit roots du blues rural et celui de la fête du swing de big bands. Il célèbre également les musiques nées et jouées dans la rue. Le groupe est costumés pour évoquer l’idée d’une « Caravane de l’étrange », entre les bouges afro américains du début du XXème siècle et les Hobos de la grande crise US de 1929.
LES DJ’S :
Rosita Warlock & Mr Djub enchaînent les disques sans autre souci que celle de la logique narrative du set. Leurs
gramophones ne sont pas électrifiés, mais simplement amplifiés. Rosita Warlock, Mr Djub confrontent ainsi deux visions : l’ancienne et la moderne. Une gestuelle - propre
au support 78 tours / gramophone – s’impose : ils doivent changer l’aiguille de la tête du gramophone après chaque
passage de disque, vérifier et nettoyer la prochaine galette, remonter la mécanique du gramophone qui n’est opérationnelle
que pour le passage d’une seule face de disque. Il leur faut également quelques fois ajuster la vitesse du plateau. Leur sélection musicale est ponctuée d’étranges tableaux.
Ainsi, ils servent une série de plateformes musicales idéales pour la libre expression de la performance et du beatboxing. Ces
sont les captain’ mécanos de l’entreprise. Dans «le civil», ils sont depuis 20 ans «Anne & Julien», respectivement journaliste spécialisée musique/bande dessinée/
cultures alternatives et programmateur musical sur une radio nationale française. Ils écrivent actuellement un livre (parution Éditions Rackham) de fables illustrées, une façon d’étendre l’univers graphique du groupe (Mr Djub créant le décor scénique des lives).
Yan De Bitche (performer) a depuis 15 ans entamé une réflexion / exploration entre les interactions de son propre corps et l’environnement extérieur proche. De l’ambiance confinée des galeries d’Art aux clubs surchauffés, des scènes des festivals musicaux aux rues des villes dans lesquelles il passe, tout devient, pour ses performances, prétextes à expériences. Parmi les personnages qu’il se construit : l’Homme Rouge ou OLAF ODGARI. Après avoir vécu retiré du monde, ce personnage renaît à la vie grâce aux vibrations de la musique diffusées par les gramophones. Au fil des morceaux, il retrouve son identité perdue d’homme civilisé et comprend alors ses talents de « mentaliste » : il constate sa
capacité à sonder les mystères de l’humanité. Il parfait la posture visuelle des dj’s et leurs discours sonores et crée une interface entre la musique d’hier et le dancefloor d’aujourd’hui. Par un enchaînement de gestuelles théâtrales proches de la danse, élégantes et muettes, il fera un lien entre l’esthétique poétique et dandy du début
du XXème siècle et l’idée actuelle / urbaine qu’on se fait d’une performance accompagnant un DJ des temps modernes. Se laissant envahir par l’esprit d’Olaf Odgari (cf les artistes), Yan De Bitche passe de l’angoisse à l’enthousiasme, déclinant une large gamme d’émotions, jusqu’à la formulation de ses fameux talents de « mentaliste ».
EZRA (Beatboxer ) entre dans la troupe pour la Saison 2 (2009 / 2010). À 25 ans, cet artiste autodidacte est depuis plusieurs années un membre actif du réseau Beatboxing international. Représentant français aux 1ers Championnats du monde de Beatboxing 2005, vainqueur du Battle TKO en 2006, il a dernièrement été membre du
jury des Championnats du monde à Berlin en 2009. En solo ou en featuring, il développe sa discipline avec un instinct, une passion et une générosité d’exception. L’ampleur de ses capacités, son goût pour l’éclectique, ses facultés d’adaptation et son aisance scénique l’ont amené à être appelé par des artistes de réputation mondiale (Kid Koala, Bauchklang), de
partir en tournée avec Camille, de collaborer avec Jacques Higelin, One Self (Label Ninja Tunes), Wax Tailor, DJ Netik, Lotek HiFi (Label Big Dada)… Outre la scène, il met autant d’énergie à se consacrer au développement de se discipline en créant des ateliers en MJC, prisons, hôpitaux, camps de réfugiés palestiniens, et la mise en place d’un réseau de
beatboxers en France. Dans 78 RPM Selector, il est Kid Odji, un personnage incarnant l’énergie de la rue, celle qui refuse les lois des conventions et dont la liberté n’est pas monnayable. Il profite de la vie, traîne dans tous les endroits où jazz et blues sont rois.
Pourquoi du Beatbox dans 78 RPM SELECTOR ?
À l’époque – celle que veut illustrer le 78 RPM Selector – la pratique des « Rent Parties » était autant sociale que culturelle. Ces fêtes en appartement, destinées à aider son organisateur à assurer le bon paiement de son loyer, invitaient soit une formation musicale classique (pianiste, guitariste, chanteur…), soit mettaient en place une installation de gramophones pour assurer l’ambiance musicale. Dans ce cas précis, se joignaient au dispositif ce que ne pouvait produire le son des machines mécaniques : contrebasse (basse), petites percussions, danseurs de claquettes (percussions légères). À l’occasion, on y ajoutait des percussions vocales (pratique que The Mills Brothers ont popularisé en leur temps). Repris et développé grâce au Hip Hop qui en a fait une de ses disciplines majeures, le Beatbox – de son appellation moderne – a continué d’égailler les rdv de quartiers. C’est pour poursuivre cette tradition populaire et de rue que le 78 RPM Selector s’est proposé, pour cette saison, d’intégrer un des meilleurs représentant français du genre dans son parcours.